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Groenland / Vie sauvage

Farouche, fugace, insaisissable : la vie sauvage au Groenland est d’abord une histoire de dissimulation, de survie, de fuite au-devant des hommes qui sont chasseurs et qui traquent pour se nourrir. L’animal aperçu ne le sera qu’un bref instant, avant de disparaître dans son ombre puis dans la vaste étendue immobile de son absence.

De minuscules oiseaux noirs et blancs, comme une mésange décolorée, et ceux, bruns et rouges, cousins arctiques du rouge-gorge avec leur tâche écarlate sur la tête. Des empreintes de cervidé dans la moraine sur les hauteurs d'Ilulissat. Un aigle qui tournoie et qui hurle et son cri qui se répète de l'autre côté de la montagne. Le souvenir des ours polaires que les chasseurs de Qeqertarsuaq ont tués il y a quatre mois sur l'île du Disko. Des ramages de rennes suspendus à l’entrée de certaines maisons. Un phoque sur son radeau de glace, son pelage brun moucheté, les longs cils de ses yeux que l'on devine même à distance autour de son regard mouillé. Le renard arctique recherché partout, sans succès, il restera comme un fantasme, un animal un peu imaginaire. Des heures passées le nez au vent polaire, des heures passées à observer les flots, et puis soudain, la majesté d'un souffle, la puissance d'un mouvement : la baleine est là qui nage au large, si lointaine et si proche ; c'est la première de la saison, elle ouvre le bal du retour à la maison.

Et puis bien-sûr, il y a les chiens, qui tiennent davantage du loup que du chien, dans les champs d’herbes jaunes broussailleuses où ils sommeillent et hurlent, appelant l’hiver de leur cri bouleversant, un cri presque humain qui dit leur nostalgie des montagnes et de la neige et de leurs courses effrénées dans l’immensité.

Ici, la nature est reine. Les vagues des glaciers font reculer les bateaux et battent les falaises, le vent amène le brouillard et isole les villages, le froid appelle la nuit polaire et endort toute forme de vie. La nature commande aux hommes et les hommes s’en remettent à elle. Imaqa, disent-ils, peut-être. Si la Nature le permet.

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